Publié le 4 novembre 2018 dans les catégories : évènements actualités
Ceci est le quatrième article d’une série visant à présenter toutes les lois votées sous la XVe législature (donc pendant le quinquennat d’Emmanuel Macron). Dans cet article sont présentées les lois votées pendant le troisième tiers de la session ordinaire 2017-2018 (donc en avril, mai et juin 2018).
Une seule des lois votées était une proposition de loi :
- La loi visant à simplifier et mieux encadrer le régime d’ouverture et de contrôle des établissements privés hors contrat, proposée par Mme Françoise Gatel du groupe Union Centriste au Sénat.
Entre parenthèses sont indiquées les dates auxquelles la loi a été votée au Sénat et à l’Assemblée nationale et la date de parution au Journal officiel (JO) (une loi n’entre en application que le lendemain de sa publication au JO, ou plus tard si précisé).
Pour trouver les journaux officiels (JOs) associés, aller sur cette page. Les lois, ainsi que le dossier législatif et le document associés, sont disponibles sur cette page de l’Assemblée nationale et cette page du Sénat. Le dossier législatif contient les textes votés à l’Assemblée et ceux votés au Sénat (dans l’ordre chronologique des éventuelles corrections), ainsi que la décision du Conseil constitutionnel s’il a été saisi. Le document est le texte adopté.
Dix lois ont été votées pendant le troisième tiers de la session ordinaire 2017-2018 (dont une pour laquelle la procédure de vote avait débuté sous la XIVe législature). Une de ces lois est une ratification d’ordonnances (une ordonnance est un règlement rédigé par le gouvernement qui peut devenir une loi ; le Parlement autorise le gouvernement à rédiger des ordonnances grâce à une loi d’habilitation ; les ordonnances paraissent au JO et ont valeur de règlement, puis de loi si elles sont validées par une loi de ratification au Parlement). Trois de ces lois sont des approbations d’accord ou de convention ou des ratifications de protocole, de traité ou d’avenant.
Loi visant à simplifier et mieux encadrer le régime d’ouverture et de contrôle des établissements privés hors contrat (Sénat 21 février, Assemblée 29 mars, JO 14 avril). ####
La proposition de loi est disponible ici, et comporte quatre articles.
Le premier article porte sur les conditions de création d’établissements d’enseignement scolaire privés, c’est-à-dire des établissements qui n’ont pas signé d’accord avec l’Etat, n’en perçoivent pas de subventions, et qui possèdent en général une plus grande liberté dans leurs programmes d’enseignement (source). D’après cette page, cet article vise à simplifier la législation en cours précédemment, et à rallonger d’une part les délais (passant à trois mois à partir de la date de déclaration de création de l’établissement auprès de l’Etat) au cours desquels les services publiques (notamment les maires de la commune accueillant le potentiel futur établissement) peuvent s’opposer à son ouverture, et d’autre part à élargir la liste des motifs d’opposition :
- Atteinte à l’ordre public, ou à l’enfance et à la jeunesse;
- La personne physique souhaitant créer l’établissement (ou le.a futur.e chef.fe d’établissement) n’est pas “française ou ressortissante d’un pays de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen”, ou a été “condamnée pour crime ou délit contraire à la probité et aux mœurs”, ou “a été privée de tout ou partie des droits civils, civiques et de famille, ou a été déchue de l’autorité parentale”, ou ne présente pas les compétences requises pour enseigner, ou est interdit d’enseignement, ou n’a pas travaillé pendant au moins cinq ans comme directeur.trice, enseignant.e, ou surveillant.e dans un établissement public ou privé de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen (source).
- L’établissement n’est pas un établissement scolaire ou technique.
- Problème de sécurité ou d’accessibilité aux locaux (source).
L’article détaille également les pièces nécessaires du dossier de déclaration d’ouverture d’un tel établissement, et décrit les sanctions appliquées en cas d’ouverture d’un établissement ayant fait l’objet d’une opposition pour l’un des motifs sus-mentionnés : 15 000 € d’amende, la fermeture de l’établissement, et une peine d’interdiction d’ouvrir et de diriger ou d’enseigner dans un établissement scolaire, à titre définitif, ou pour une durée inférieure à cinq ans (source).
Le deuxième article porte sur le contrôle annuel de tels établissements, qui, s’ils bénéficient d’une plus grande liberté sur leurs programmes et emplois du temps, doivent assurer à leurs étudiants le socle requis de connaissances pour leur niveau, et ne pas porter préjudice à la moralité et à l’ordre public (source). En particulier, l’Etat s’assure que les directeurs et enseignants possèdent les diplômes requis pour exercer leur métier, et contrôle le respect de “[…] l’obligation scolaire, […] l’instruction obligatoire, […] l’ordre public, […] la prévention sanitaire et sociale et [de] la protection de l’enfance et de la jeunesse.”
Loi organique relative à l’organisation de la consultation sur l’accession à la pleine souveraineté de la Nouvelle-Calédonie (Sénat 20 février, Assemblée 20 mars, JO 20 avril).
Le texte est disponible sur cette page.
Contrairement à une loi ordinaire, une loi organique est chargée de préciser le contenu de la Constitution, et en particulier, de légiférer la répartition et le fonctionnement des pouvoirs publics (source). Ce projet de loi, qui a bénéficié d’une procédure accélérée, porte sur l’organisation du scrutin sur l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie : en effet, une partie de la population (en particulier Kanak) souhaite se détacher de la France, et des revendications importantes depuis les années 1980 ont permis à la Nouvelle-Calédonie d’accéder à un statut d’“autonomie”, sans pour autant permettre à la population néo-calédonienne d’avoir droit à l’autodétermination. Suite à des révoltes violentes, l’accord de Matignon en 1988, puis celui de Nouméa en 1998 (source), ont prévu un référendum d’autodétermination prévu le 4 novembre 2018 (source).
En particulier, ce texte de loi prévoit l’inscription d’office sur le corps électoral général de toutes les personnes ayant leur domicile ou habitant depuis plus de six mois en Nouvelle Calédonie (source), et l’inscription d’office sur le corps électoral qui votera lors du référendum (qui exclut les personnes arrivées sur le territoire après 1994 (source)). Ce texte porte également sur différents aspects de la consultation (notamment, le recours au vote par procuration qui sera particulèrement encadré (source), ainsi que le paiement par l’Etat des frais engagés pour la consultation par les divers partis politiques) (source).
Loi relative à la protection des données personnelles (Assemblée 13 février, 12 avril et 14 mai, Sénat 21 mars et 19 avril, JO 21 juin).
Le texte est disponible sur cette page, et a bénéficié d’une procédure accélérée, et d’une réunion d’une Commission mixte paritaire. Le Conseil constitutionnel a été saisi par plus de soixante sénateurs, notamment pour l’article 13 qui sera décrit ci-dessous, et dont une partie a été jugée non constitutionnelle (source).
L’objectif affiché est “d’adapter au droit [européen] la loi […] relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés” (source), ce qui est explicité dans la première partie du texte de loi.
La première partie du texte redéfinit les missions de la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL), créée en 1978 (source), qui, actuellement, procure de l’information sur les droits sur les données personnelles de chacun, effacer les données personnelles sur la demande de l’individu sur lequel elles portent, limiter l’utilisation de données personnelles (source). La CNIL est désormais autorisée, sous certaines conditions, à délibérer sans la présence obligatoire d’une personne rattachée au gouvernement, et son intervention dans des missions de contrôle est précisée (source). Des propres mots des pages officielles du gouvernement, elle devient “l’autorité nationale de contrôle pour l’application du [Règlement général sur la protection des données (RGPD)]”, et ses pouvoirs de sanction sont renforcés (source).
Le deuxième chapitre de cette partie porte sur la réglementation de certains types de données. Notamment, l’article 8 précise “Il est interdit de traiter des données à caractère personnel qui révèlent la prétendue origine raciale ou l’origine ethnique, les opinions politiques, les convictions religieuses ou philosophiques ou l’appartenance syndicale d’une personne physique ou de traiter des données génétiques, des données biométriques aux fins d’identifier une personne physique de manière unique, des données concernant la santé ou des données concernant la vie sexuelle ou l’orientation sexuelle d’une personne physique”. D’autre part, “Pour les mineurs de moins de quinze ans, le consentement des titulaires de l’autorité parentale sera nécessaire pour le traitement des données personnelles sur les réseaux sociaux. C’est à partir de l’âge de quinze ans qu’un mineur pourra s’inscrire sur des réseaux sociaux sans autorisation parentale” (source).
La deuxième partie du texte acte :
- l’application de la loi nationale française dès que la victime d’une infraction réside en France, même lorsque le responsable du traitement des données n’est pas établi en France, en cas de divergences entre les lois des pays de l’Union européenne;
- l’article 13, contesté par certains sénateurs, qui porte sur le traitement des données personnelles dans le cadre de condamnations pénales, d’infractions, ou de mesures de sécurité. A l’origine, ces traitements devaient être supervisés par “[…] l’autorité publique” (source). Or, cette autorité et ses objectifs n’ayant pas été définis précisément, le Conseil constitutionnel a jugé que cet article pouvait porter atteinte aux garanties fondamentales individuelles pour l’exercice des libertés publiques. La mention de ces mots a donc été retirée du texte de loi.
- les modalités de recours pour une personne à une association ou une organisation afin d’effectuer en son nom une réclamation auprès de la CNIL (article 16).
Loi relative à l’élection des représentants au Parlement européen (Assemblée 20 février et 14 mai, Sénat 11 avril et 23 mai, JO 26 juin).
Le texte de loi est disponible ici, a été examiné en procédure accélérée (source), et a requis la formation d’une Commission mixte paritaire. Il comporte neuf articles.
Le premier article vise à rétablir une circonscription unique, au lieu des huit actuelles : Outre-mer, Est, Sud-Est, Ouest, Nord-Ouest, Sud-Ouest, Massif central-Centre, Île-de-France, (établies depuis 2003 (source)), pour les élections européennes. Le but affirmé est d’uniformiser l’élection vis-à-vis des autres pays de l’Union européenne, et de rendre plus compréhensible le fonctionnement de l’élection et d’ainsi baisser le taux d’abstention particulièrement élevé pour ces élections (source). Cependant, des députés d’Outre-mer s’inquiètent du manque de représentativité que cela pourrait entraîner pour leurs départements au niveau européen (source), ainsi que des députés Les Républicains, qui pointent du doigt le possible avantage des grands partis dans une circonscription unique (source).
Le deuxième article vise à légiférer sur les temps de présence de chaque liste lors de la campagne pour les élections. La répartition des temps de présence dépendra essentiellement des résultats des partis aux dernières élections, dont les dernières élections européennes, ainsi que sur des “indications de sondages d’opinion” (!). De plus, “[les] dépenses liées à la campagne audiovisuelle officielle sont à la charge de l’Etat”, et l’article 4 fixe les plafonds de dépenses des candidats.
L’article 6 indique la nécessité pour les élus européens français d’adresser une déclaration d’intérêts à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) (source).
Loi pour un nouveau pacte ferroviaire (Assemblée 17 avril et 13 juin, Sénat 5 juin et 14 juin, JO 28 juin).
Le projet de loi est disponible sur cette page. Ce projet de refonte de la SNCF a fait beaucoup d’émules au niveau national (source), et a fait l’objet d’une procédure accélérée de la part du gouvernement (avec notamment la convocation d’une Commission mixte paritaire (source)). Malgré la mobilisation importante des syndicats de cheminots et des usagers (source), notamment due à la perte du statut particulier de cheminot (décrit en partie ici), aux réformes critiquées du réseau ferroviaire dans d’autres pays européens (source), et à la préconisation de la fermeture de 9 000 km de petites lignes jugées non rentables (source), ce projet a finalement été adopté.
Il a fait suite à un rapport de Jean-Cyril Spinetta, qui soulignait des performances insuffisantes, une grosse dette (54,4 milliards d’euros) (source), et un grand retard dans la modernisation des lignes ferroviaires (source).
Le gouvernement peut désormais créer des ordonnances (et non via la voie législative régulière) au niveau notamment de l’organisation et du statut juridique de la SNCF, des conditions de recrutement et du statut des agents ferroviaires, et des modalités d’ouverture (des lignes) à la concurrence (source).
Ce projet de loi acte :
- le changement de statut de la SNCF : d’établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC), elle passera au statut de Société anonyme à capitaux publics (SA) (source), ce qui implique notamment une limitation de la dette maximale autorisée. L’article 1 du projet de loi stipule en particulier que “le capital de la société nationale SNCF est intégralement détenu par l’Etat”, ce qui empêche a priori une privatisation. Rien n’est indiqué quant à la résolution de la dette actuelle de la SNCF (source), et cela pose notamment un problème pour le changement de statut de la SNCF. Le gouvernement a annoncé cependant que l’Etat reprendrait 35 milliards d’euros de la dette actuelle (source).
- la disparition du statut de cheminots pour les nouveaux embauchés à partir de fin 2019, mais la non-atteinte du statut de cheminot pour les personnes embauchées avant 2020.
- son ouverture progressive à la concurrence (et notamment la transition des cheminots d’une entreprise ferroviaire à sa concurrente : les droits des personnes embauchées au statut de cheminot, et leur niveau de rémunération seront conservées). (source) La concurrence sur les lignes régionales et TGV commencera à l’horizon 2020, sauf au niveau de l’Ile-de-France, où elle sera prévue entre 2023 et 2039 (source).
Loi relative au défibrillateur cardiaque (Assemblée 13 octobre 2016 (XIVe législature), Sénat 13 juin 2018, JO 29 juin).
Le texte est disponible sur cette page.
Cette loi accompagne l’équipement d’établissements recevant du public en défibrillateurs automatisés externes.
Loi ratifiant l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations (Sénat 17 octobre 2017, 1er février 2018 et 11 avril, Assemblée 11 décembre 2017, 15 février 2018 et 22 mars, JO 21 avril).
Le texte est disponible sur cette page.
Ce texte a âprement été discuté, et a nécessité la réunion d’une Commission mixte paritaire (source). Le but affirmé de ce projet de loi est l’accessibilité (par la modernisation et la simplification de la loi (source)) accrue aux droits et devoirs associés à un contrat pour une majorité de la population (“même non juriste”), et permet la simplification et la création de nouveaux mécanismes juridiques, tels que la résolution unilatérale d’un contrat sous certaines conditions, la réception de preuves numériques, et la sanction en cas d’abus avéré (source).
Le contenu de la loi demeurant toutefois extrêmement technique, la lecture d’un article plus détaillé (tel que celui-ci), ainsi que de l’exposé des motifs présenté à l’Assemblée nationale (source) sera utile.
Loi autorisant la ratification du protocole n° 16 à la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. (Assemblée 20 décembre 2017, Sénat 15 février, JO 4 avril)
Ce texte est disponible ici. Le protocole n° 16 à la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales a été signé à Strasbourg le 2 octobre 2013, et entre donc en vigueur cette année. “[Selon] le Gouvernement, il instaure un mécanisme permettant aux plus hautes juridictions nationales de saisir, à l’occasion d’un litige, la Cour européenne des droits de l’homme pour avis sur des questions de principe relatives à l’interprétation ou à l’application des droits et libertés définis par la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ou ses protocoles” (source, source). Un article détaillé sur ce protocole est disponible sur cette page.
Loi autorisant l’approbation du protocole additionnel à l’accord du 9 octobre 1997 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérale d’Allemagne relatif à la coopération dans leurs zones frontalières entre les autorités de police et les autorités douanières concernant l’emploi transfrontalier d’aéronefs. (Sénat 2 novembre 2017, Assemblée 15 février, JO 20 avril)
Le texte de loi est disponible sur cette page.
Loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté d’Andorre concernant l’amélioration de la viabilité des routes nationales 20, 320 et 22 entre Tarascon-sur-Ariège et la frontière franco-andorrane. (Assemblée 20 décembre 2017, Sénat 15 février, JO 28 avril)
Ce texte est disponible ici.
Modifications du 04/11/2018 : Remplacement dans les titres de “Proposition/Projet de loi” par simplement “Loi” (ces lois ayant été votées et étant actuellement en vigueur). Correction de fautes d’orthographe. Ajout du lien vers le texte de loi pour la loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Conseil des ministres de Bosnie-Herzégovine relatif à la mobilité des jeunes. Ajout des dates de passage à l’Assemblée nationale, au Sénat et au JO pour les lois où ces informations étaient manquantes. Modifications du premier paragraphe pour ressembler à celui des articles précédents.
Modifications du 12/08/2019 : Sept lois ont été enlevées pour être mises dans l’article où est leur place. Une loi a été ajoutée (on l’avait ratée à l’époque).
Modifications du 28/08/2019 : Modifications des premiers paragraphes pour plus de cohérence entre les différents articles. Ajout d’un lien.
Modifications du 04/11/2019 : Modification de l’ordre des lois (désormais, les lois d’approbation/ratification d’accord/protocole/traité sont mises à la fin, les ratifications d’ordonnances juste avant, les habilitations d’ordonnances juste avant, les lois de financement/règlement du budget juste avant, et les autres lois juste avant; à l’intérieur de ces catégories, l’ordre est l’ordre de parution au JO).